intervention de Claire Loubignac lors de la commission des services publics du 02/12/2010.

Publié le par eausecourservicepublic17.over-blog.com

Bonsoir à tous,


Je suis chargée de vous parler de la gestion de l’eau à Saintes au nom de l’association ESSP17.
Comment est née ESSP17?


Lors de la campagne des municipales en 2008 à Saintes, la question régie publique ou délégation à une entreprise privée pour l’eau a été soulevée. Un collectif de l’eau s’est créé à la rentrée 2008, composé d’associations et de partis de gauche. Puis ce collectif a souhaité se transformer pour avoir un statut  reconnu : l’association Eau Secours Services Publics 17 a été créée début 2010. En abrégé, ESSP17. L’association est adhérente à la Coordination Eau Adour Garonne ; nous avons d’ailleurs participé à sa création à Condom en Juin dernier. Toutes les associations adhérentes à cette coordination poursuivent les mêmes objectifs : le retour en régie publique pour la gestion de l’eau et la protection de la ressource en eau, parce que l’eau n’est pas une marchandise mais un bien commun vital.


Situation à Saintes :
Notre ville a délégué la gestion de l’eau à Saintes depuis des décennies. Actuellement Véolia est le délégataire des 2 contrats eau et assainissement. Ces 2 contrats se terminent fin 2013. La municipalité actuelle avait décidé de choisir en 2010 entre retour en régie ou délégation de services publics, puis elle s’est donnée 1 an de réflexion supplémentaire et devrait se décider en 2011.


Que reprochons-nous à la gestion Véolia ?
Nous lui reprochons sa très grande opacité financière ! Tous les ans, Véolia présente pour l’eau et pour l’assainissement, des comptes conformes à des circulaires FP2E (c’est-à-dire de la Fédération des Professionnels des Entreprises de l’Eau), comptabilité inconnue des non-initiés. Nous souhaiterions que la municipalité exige l’utilisation des normes du plan comptable général, plus usuelles, plus compréhensibles et d’ailleurs obligatoires pour une régie.


Grâce à cette comptabilité FP2E, tous les ans, les comptes d’exploitation de Véolia sont en déficit pour les 2 contrats. Quels avantages peut bien en tirer Véolia ?
- très probablement, Véolia  paie moins d’impôt en déclarant du déficit,
- ce déficit lui permet de justifier auprès des élus les demandes de hausse de prix pour le m3 d’eau,
- ce déficit fait croire aux élus qu’ils ont signé de bons contrats, puisque le délégataire travaille soi-disant à perte,
- et surtout, il sert à les dissuader de revenir en régie, car une régie est tenue d’avoir des comptes équilibrés et donc d’augmenter ses prix en cas de déficit.


Dans l’association ESSP17, nous ne croyons pas à ces prétendus déficits. Dans bien d’autres villes françaises, Véolia se déclare aussi en déficit ; à Quimper par exemple,  mais ça ne l’a pas empêché de signer un nouveau contrat de DSP avec la ville de Quimper ! Si le déficit avait été réel, Véolia n’aurait pas cherché à renouveler le contrat.


Où en est la municipalité saintaise?
 Lors de la campagne électorale de 2008, le futur maire avait promis le retour en régie. En 2010, les choses sont moins claires. La municipalité a commandé en 2009 un audit, en plusieurs tranches. Le cabinet d’audit a rendu ses conclusions de la 1ère tranche au printemps 2010. En voici le résumé : les charges d’une régie seraient supérieures de plus de 20% à celle d’une grande multinationale de l’eau. Comment est justifié ce résultat ? Plus le client est gros, plus on lui propose des prix bas, c’est bien connu ! Donc tout est acheté moins cher par une grande multinationale que par une petite régie. Dans Saintes, tout le monde s’est empressé  de remplacer charges par prix et d’en conclure que « les prix de la régie publique seraient de plus de 20 % supérieurs à ceux d’une délégation de service public » ! Ce faisant, tout le monde s’est fait avoir, le cabinet d’audit n’a pas rectifié, ni la municipalité! Il nous a fallu plusieurs semaines pour comprendre,  et encore parce que par chance, nous avons un ex-professionnel de l’eau dans l’association ! Je m’explique :
 La 1ère tranche de l’audit n’a porté que sur les charges de la gestion de l’eau et de l’assainissement, et on a laissé croire que « charges = prix ». Or c’est vrai pour une régie qui n’a pas le droit de faire du profit. Pour elle,  ce sont bien les charges seules qui déterminent le prix. Mais pour une multinationale,  les charges ne sont qu’un élément du prix car elle doit en plus rémunérer ses actionnaires. Et les actionnaires, comme chacun sait, sont devenus de plus en plus voraces et exigeants  ces dernières années. Dans le secteur de l’eau, les marges de 20% à 30%, c’est monnaie courante !


 On a tenté de nous faire croire que les économies d’échelle faites par une multinationale de l’eau profitent aux abonnés. C’est faux ! Les économies d’échelle profitent avant tout aux actionnaires!


Que contient le rapport d’audit ?
Nous approuvons le rapport d’audit lorsqu’il critique les comptes-rendus financiers de Véolia. Je cite une phrase : « cet amalgame ne donne pas une image juste du chiffre d’affaires réellement perçu par le fermier ». Nous approuvons également la remise en cause de la masse salariale déclarée par Véolia. Le cabinet d’audit écrit: «  l’étude conduit pour l’eau potable (…) à considérer que le poste personnel est survalorisé dans sa présentation annuelle ».
Cependant, malgré quelques points d’accord, cet audit ne nous convainc pas. Je vais essayer d’expliquer pourquoi. Le rapport compare les charges de 3 gestions différentes :
- les charges de Véolia, délégataire actuel
- les charges  estimées d’une régie publique
- les charges  estimées d’une délégation de service public idéale que nous appelons délégation fictive.


C’est cette délégation fictive qui sert à disqualifier la régie publique car elle est toujours celle des 3 ayant les charges les plus faibles. Il faut dire que le cabinet d’audit y met le paquet : par exemple, pour le contrat d’eau potable, la délégation fictive  n’a ni frais informatique, ni frais téléphoniques ou de télétransmission, sa masse salariale est diminuée de 40%  par rapport à celle que  déclare Véolia actuellement! Elle dépenserait 34% de moins  que Véolia en ce qui concerne les Engins et Véhicules, etc. Ces baisses nous paraissent exagérées.


Le cabinet d’audit maltraite la régie publique en mettant le paquet là aussi : la masse salariale de la régie est augmentée de 39% par rapport à la DSP fictive pour le contrat de l’eau, et augmentée de 76% pour le contrat d’assainissement ! Là aussi, ça nous parait exagéré !
Notons au passage que malgré tout, le cabinet d’audit attribue à la régie des charges inférieures à celles de Véolia pour le contrat de l’eau! 9% en moins !
Bref, nous jugeons cet audit construit pour disqualifier la gestion en régie publique.


En conclusion, je voudrais revenir sur un point souvent mis en avant. On nous dit : « Mais de quoi vous plaignez-vous ? L’eau n’est pas chère à Saintes ! »
Effectivement, avec un prix de 2,66 euros le m3 tout compris (taxes et abonnement), on peut dire que l’eau  est ici moins chère qu’en bien des endroits. Mais nous pensons que c’est normal car Saintes est gâtée par la nature ! Le captage de Lucérat est situé aux portes de la ville. Notre eau est si abondante que nous en vendons l’été aux villes du littoral royannais, autant que nous en consommons en 1 année. De plus l’eau est ici très calcaire, elle a tapissé l’intérieur des canalisations, ce qui réduit naturellement les fuites d’eau.


Alors pourquoi voulons-nous la régie ?
Nous voulons la régie car nous pensons que les Saintais ont assez contribué depuis plus de 30 ans à faire de la CGE devenue Véolia, le n°1 mondial de l’eau.
Nous pensons avoir assez cotisé pour gaver les actionnaires et payer la retraite chapeau de M. Proglio : 1 million d’€ de pension annuelle !
Nous avons assez payé pour les salaires d’hommes politiques  recasés chez Véolia entre 2 mandats d’élu ou de ministre : Dominique de Villepin,  Eric Besson pour ne citer que les plus célèbres. Ces hommes politiques font du lobbying pour Véolia dans tous les centres de décision  en France, à Bruxelles, à l’ONU. Nous ne voulons plus être complices de ce  lobbying qui n’a rien à voir avec la démocratie.
A  ESSP17, nous réclamons la transparence financière ! Nous voulons une régie publique pour être sûr que l’argent de notre facture d’eau ne servira qu’à payer l’eau et son assainissement!

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